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cr  03.08.2022      r+  22.10.2024      r-  22.10.2024      Pierre Pinard.         (Alertes et avis de sécurité au jour le jour)

Les fiches de police STIC (Système de Traitement des Infractions Constatées) ont commencé à fusionner, le 1er janvier 2014, avec JUDEX (Système JUdiciaire de Documentation et d’EXploitation) pour donner le TAJ (Traitement des Antécédents Judiciaires). Mais, qu'étaient ces fiches STIC que l'on retrouve dans TAJ ?

Les fiches STIC constituent une base de données de la police nationale française. Ces fiches sont nominatives. Plus de la moitié des Français sont fichés et ont une fiche STIC qui les concerne.

Chaque fiche STIC regroupe, pour chaque personne mise en cause ou victimes d’infractions pénales, toutes les informations concernant les antécédents judiciaires et les procédures établies par les services de police.

Les fiches JUDEX sont l'équivalent des STIC pour la Gendarmerie nationale.

Lors de cette fusion, il sera déclaré que les fiches STIC sont presque toutes fausses !



Dimanche 6 mai 2012 - Fusion des fichiers STIC et JUDEX

Dimanche 6 mai 2012, alors que le second tour de l'élection présidentielle française va voir la défaite de Nicolas Sarkozy dans la soirée, Claude Guéant, « plume » de Nicolas Sarkozy, et alors ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l'Immigration fait publier un décret d'application de la loi LOPPSI 2 (Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure) dont l'une des dispositions porte fusion des fichiers STIC et JUDEX.

Le nouveau fichier, TAJ (Traitement des Antécédents Judiciaires) est un fichier d’antécédents judiciaires dont la vocation première est d’assurer la fusion entre STIC et JUDEX, deux bases de données relevant respectivement de la police nationale et de la gendarmerie nationale. L’existence d’une base de données commune aux deux forces de l'ordre présente de nombreux avantages. Outre le fait qu’elle permet d’éviter les doublons entre STIC et JUDEX, elle est nécessairement plus exhaustive et constitue un gain de temps pour les forces de l’ordre, qui n’ont plus qu’un seul fichier à consulter.

Cette base de données unique permet également de mutualiser les moyens dédiés à sa gestion, grâce à une administration unique confiée à la police nationale.

Le 8 mai 2012, trois jours avant la démission du gouvernement dont il fait partie, Claude Guéant fait publier le décret d'application d'une autre mesure de la loi LOPPSI 2, le « Fichier d'analyse sérielle ».

Treize dispositions de la loi LOPPSI 2 ont été invalidées par le Conseil Constitutionnel le 10 mars 2011.



STIC (désormais TAJ) est opéré par le Ministère de l'Intérieur et comporte de nombreuses informations sur les personnes concernées (mises en cause ou victime). Les fiches sont individuelles et font apparaître la personne et les détails des raisons d'une action de police ou gendarmerie. Si plusieurs personnes sont concernées, il y a autant de fiches STIC créées (ou complétées si elles existent déjà). STIC (TAJ) produit donc des fiches sur chaque individu. Ces fiches font apparaître la totalité des procédures pénales dans lesquelles un individu a été cité, qu'il soit coupable (même s'il a été blanchi) ou victime. Tout y est (crime, délit et contraventions de Ve classe).

Nul ne conteste la nécessité de la création et l'utilisation d'un tel fichier par la police nationale et la gendarmerie nationale.

Selon le SGP (Syndicat des Gardiens de la Paix - syndicat majoritaire), certaines de ces informations remontent à 1965.

STIC (TAJ) relève de la responsabilité du Directeur Général de la Police Nationale (DGPN) et est géré par la sous-direction de la police technique et scientifique (Institut National de Police Scientifique - INPS [Écully, dans le Rhône], un établissement public à caractère administratif, sous tutelle du DGPN, créé par la loi de sécurité quotidienne de 2001).

L'INPS a pour mission, entre autres, de « réaliser tous les examens, recherches et analyses d'ordre scientifique et technique qui lui sont demandés par les autorités judiciaires ou les services de police et de gendarmerie, aux fins de constatation des infractions pénales et d'identification de leurs auteurs ».



Plus d'un français sur deux a sa fiche STIC. Selon les chiffres publiés par la CNIL le 22 juin 2009, concernant décembre 2008, le STIC recensait :

  • 36 500 000 de procédures.

  • 37 911 000 infractions.

  • 5 552 313 individus mis en cause.

  • 28 329 276 victimes.

  • 10 millions d’objets.



En décembre 2008, près de 100 000 personnes étaient habilitées à accéder aux fiches STIC dans le cadre d’une mission de police judiciaire, de police administrative ou de fonctions de gestion du fichier, ce qui fait beaucoup de monde, presque tout le monde si l'on sait que l’effectif total de la police nationale, toutes catégories confondues, au 1er novembre 2008 est de 146 116 :

  • Personnels individuellement désignés et spécialement habilités des services de la police nationale et de la gendarmerie nationale ainsi que les agents des douanes habilités à effectuer des missions de police judiciaire.

  • Magistrats du parquet ainsi que les magistrats instructeurs pour les recherches relatives aux infractions dont ils sont saisis.

  • Sous certaines conditions, les personnels investis de missions de police administrative individuellement désignées et spécialement habilités par le préfet.

  • Sans compter, ajoute le commandant Philippe Pichon, ceux qui utilisent le code d’accès d’un collègue qui traîne sur un post-it collé sur l’écran de l’ordinateur.

  • Il y a aussi ceux qui sont à la retraite, mais dont le compte n'a pas été supprimé, les entreprises amenées à embaucher dans le domaine de la surveillance, le gardiennage sensible, la protection rapprochée...



Avant 2009, selon la CNIL (Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés), les fiches STIC comportaient 25% d'erreurs, mais la CNIL a réalisé une analyse de STIC en 2008 et publié ses conclusions le 22 janvier 2009. On parle désormais d'un taux d'erreur de 83% (seuls 17% des fiches de personnes mises en cause seraient exactes).

  • Seul 0,5% des non-lieux sont notifiés dans le fichier STIC.

  • Seuls 7% des acquittements sont notifiés dans le fichier STIC.

  • Seuls 21% des décisions de classement sans suite sont notifiées dans le fichier STIC.

  • Seuls 31% des relaxes sont notifiées dans le fichier STIC.

Le rapport de la CNIL : Conclusions du contrôle du système de traitement des infractions constatées (STIC) par la CNIL le 20 janvier 2009.

  • Cela signifie que des personnes innocentées par la justice sont toujours considérées comme suspectes dans les fiches STIC de la police.

  • Cela signifie que les données utilisées dans le cadre légal, et qui sont vendues, en toute illégalité, par certains qui y ont accès, sont presque toujours fausses !



Le commandant Philippe Pichon déclare, au moment de l'affaire IKEA :

« Je trouve dommage de stigmatiser Ikea, car d’autres groupes français ou étrangers puisent abondamment leurs informations dans le fichier STIC ». « STIC est utilisé par des policiers ou des chefs d’entreprises peu scrupuleux, à des fins d’espionnage (…) La plupart du temps, contre une bouffe, ça sert les DRH d’entreprises pour savoir quelle est la « fiabilité » d’un employé ».

Selon Philippe Pichon, les policiers qui monnayent leurs informations « restent quand même l’exception ».

Les fiches de police STIC se monnayent 80 €

Le Canard Enchainé reproduit une série de courriels explicites entre le directeur de la gestion du risque d'Ikea France, Jean-François Paris, et des responsables de sociétés spécialisées dans la collecte de données privées. L'un de ces courriers, intitulé « objet : Accord STIC » prouve que le groupe suédois Ikea s'est procuré les informations sensibles et en théorie réservées à la police nationale.

De fait, le STIC (TAJ), un fichier détenu par les services de police, rassemble des informations relatives à tous les individus impliqués dans une infraction (les auteurs présumés comme les victimes) et interpellés par la police. La CNIL a toutefois sérieusement mis en doute la crédibilité de ces informations (les fiches STIC seraient fausses à 83%). Mais qu'importe !

La société IKea n'a pas hésité à se procurer ce fichier en échange de confortables rémunérations. À la question de la société privée : « Que te proposer de plus et de mieux que 80 euros par consultations équivalentes à celles du STIC ? Je te souhaite un bon Noël », le « responsable risque », chez Ikea, a répondu d'un cinglant «Vendu !».

Pour dénoncer les dysfonctionnements du fichier STIC (TAJ), le commandant Philippe Pichon avait sorti en 2009 les fiches STIC (TAJ) de Johnny Hallyday et Jamel Debbouze, qu’il avait transmises à un site d’information satirique. Ces faits lui ont valu une mise à la retraite d’office (suspendue quelques mois plus tard par le tribunal administratif).



Certains employés qui ont accès aux fiches STIC préfèrent être payés en espèce plutôt qu’en bonne bouffe. Le tarif est alors de 80€.



Un droit d'accès et de rectification est prévu dans les textes.

Pour la base de données des fiches STIC, c'est la CNIL qui effectue elle-même les vérifications souhaitées. Pour cela, il faut adresser au Président de la CNIL un courrier et y joindre une copie d'une pièce d'identité.

  • CNIL :
    Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés
    8 rue Vivienne
    CS 30223
    75083 PARIS CEDEX 02

Toute personne identifiée dans la base de données STIC en qualité de victime dans un jugement peut s’opposer à la conservation, dans cette base de données, d’informations nominatives la concernant dès lors que l’auteur des faits concernés a été condamné de façon définitive. Pour obtenir la suppression, dans sa fiche STIC, des données relatives à l'affaire jugée, il convient d’adresser sa demande, accompagnée d’une attestation du tribunal ayant condamné l’auteur des faits, au :

  • Ministère de l’Intérieur
    Direction générale de la police nationale
    11 rue des Saussaies
    75008 PARIS

Toute personne identifiée dans la base de données STIC (base de données TAJ depuis le 6 mai 2012) en qualité de personne mise en cause dans une enquête judiciaire ouverte à la suite de l’une des infractions donnant lieu à inscription au STIC (crime, délit et certaines contraventions de Ve classe) peut demander la rectification ou la suppression des données concernant cette affaire en s’adressant au procureur de la République territorialement compétent ou au procureur général près la cour d’appel en cas de décision prononcée par cette juridiction, dans les cas suivants :

  1. Les faits ayant donné lieu à l’enregistrement de la personne dans le STIC ont fait l’objet d’une requalification judiciaire (ex. : une procédure pénale a été ouverte pour vol aggravé puis le juge d’instruction ou la juridiction de jugement considère qu’il s’agit d’un vol simple).

  2. La personne concernée a été acquittée ou relaxée.

  3. La personne concernée a bénéficié d’une décision de non-lieu ou d’un classement sans suite pour insuffisance de charges.

  4. L’intéressé peut demander que la fiche le concernant soit complétée par une référence à cette décision ou soit même effacée. La mise à jour de la fiche est de droit. En revanche, son effacement relève du pouvoir d’appréciation du procureur de la République qui peut s’y opposer.



L'utilisation frauduleuse de données personnelles et l'atteinte à la vie privée sont des infractions passibles, d'une manière générale, de :

  • 5 ans d'emprisonnement

  • 300.000 euros d'amende.



Principaux fichiers de police en France :

  1. AGRIPA : Fichier des personnes possédant des armes à feu

  2. CIBLE : Fichier de Comparaison et d'Identification Balistique par Localisation des Empreintes

  3. CRISTINA : Centralisation du Renseignement Intérieur pour la Sécurité du Territoire et des Intérêts Nationaux.

  4. EDVIGE : Fichier Exploitation Documentaire et Valorisation de l'Information GénéraleE.

  5. FAC : Fichier Automatisé des Casinos et salles de jeux

  6. FAED : Fichier Automatisé des Empreintes Digitales

  7. FAR : Fichier Alphabétique des Renseignements

  8. FBS :  Fichier des Brigades Spécialisées

  9. FCA : Fichier du Contrôle Automatisé

  10. FDST : Fichier de la Direction de la Surveillance du Territoire (Christina)

  11. FDLB : Fichier De La Batellerie.

  12. FIJAIS : FIchier Judiciaire Automatisé des auteurs d'Infractions Sexuelles.

  13. FIP :  Fichier du centre national d'analyse d'Images Pédopornographiques

  14. FIT : Fichier Informatisé du Terrorisme

  15. FNAEG : Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques

  16. FNFM : Fichier National du Faux Monnayage

  17. FNPC : Fichier National des Permis de Conduire

  18. FNPE : Fichier National des Personnes nées à l’Étranger

  19. FNT :  Fichier National Transfrontière

  20. FOS : Fichier des Objets Signalés

  21. FPIS : Fichier des Personnes Interdites de Stade

  22. FPR : Fichier des Personnes Recherchées

  23. FRG : Fichier des Renseignements Généraux (abandon du projet Edwige)

  24. FSCP : Fichier du Service Central des Prélèvements Biologiques

  25. FS-PORA : Fichier de Suivi des Personnes faisant l’Objet d’une Rétention Administrative

  26. FTIVV  : Fichier de Traitement des Images des Véhicules Volés

  27. FTPJ : Fichier de Travail de la Police Judiciaire

  28. FVVS : Fichier des Véhicules Volés et Signalés

  29. JUDEX : Système JUdiciaire de Documentation et d’EXploitation

  30. N-SIS : Partie Nationale du Système d'Information Schengen.

  31. RAPACE : Répetoire Automatisé Pour l’Analyse des Contrefaçons de l’Euro

  32. SALVAC : Système d'Analyse des Liens de la Violence Associée aux Crimes

  33. SCPPB  : Fichier du Service Central de Préservation des Prélèvements Biologiques

  34. SDRF : Fichier des personnes sans Domicile ni Résidence Fixe.

  35. SIS-Schengen : Système d'Information Schengen

  36. STIC : Système de Traitement des Infractions Constatées de la police nationale.

  37. STUC : Système de Traitement Uniformisé de la Cocaïne

  38. STUPS : Système de Traitement Uniformisé des Produits Stupéfiants

  39. TAJ : Fichier de Traitement des Antécédents Judiciaires

  40. TREIMA : Thésaurus de Recherche Electronique d'Imagerie en Matière Artistique



  • Les fiches STIC de la police française